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La transition professionnelle au service de la transition sociétale

Interview d’Isabelle LASLIER-OKALA [1] 

Quels sont les moments pivots de votre parcours de transitions professionnelles ?

 

 

J’effectue deux transitions professionnelles à la cinquantaine :

Tout d’abord, je sors d’une longue expérience dans le secteur de la distribution pharmaceutique pendant laquelle je m’occupe de marketing opérationnel, de relations publiques, d’évènementiel, de formations clients pour les pharmaciens.

À la suite d’une réorganisation, je fais un Burn out et prends la décision de quitter l’entreprise Dans les premières semaines, je cherche un poste similaire et m’aperçois que cela ne me convient pas.

 

C’est alors que je décide de faire un bilan de compétences. Nous le démarrons avec les Solidités® [2] plutôt que sur un questionnement sur ce que je souhaite faire. J’assois ma réflexion sur des bases constructives, des fondations qui me font avancer vers une réflexion et un renouveau professionnel. C’est comme un accouchement.

Cette réflexion sur les Solidités® m’aide à formuler ce que je veux faire et je décide de me donner les moyens pour y arriver.

[2] Solidités® : https://grandir.fr/accompagnement-collectif/solidites/

Première transition
Ce à quoi j’aboutis, n’est pas une surprise : l’hôtellerie restauration me plait dès ma jeunesse. Et puis, dans mes anciennes fonctions, j’étais déjà en lien avec ce secteur. Cela ressort donc très fortement mais il y a du monde, il faut être légitime.

Pendant un an, je fais donc l’École du Management Hôtelier de Luxe International. (Milieu intergénérationnel, cours en anglais, projets d’équipe, stages…).

Mes stages dans un groupe de grands hôtels se déroulent avec succès, je suis repérée. Je prends la direction d’un hôtel du groupe le 17 mars 2020, date du confinement général ! Je deviens la directrice d’un hôtel qui ferme. Je décide de quitter le groupe après un an d’inactivité, car la période est trop incertaine et j’ai besoin d’action.

Pendant le covid, il y a de nombreux décès. Je fais le parallèle entre le service de l’hôtellerie qui s’arrête (ce que je pensais alors impossible) et le service des funérailles qui ne s’arrête jamais. Deux ans auparavant j’organise des obsèques d’un proche. En rencontrant les personnes qui m’avaient reçues à cette occasion, je me dis : j’aimerais bien faire ce métier.

Dans l’hôtellerie, je pratique l’hospitalité (« hospitality management », en anglais) ; dans les services funéraires également pour deux types de personnes :

  • Les familles accompagnées dans le deuil
  • Les défunts à qui nous devons le respect et pour qui nous organisons cette hospitalité définitive, conforme à leurs souhaits, leurs croyances, leurs finances.

Deuxième transition

Directrice d’une agence de funérailles
Je téléphone à une amie qui travaille dans le secteur et qui m’encourage à suivre cette voie même si cela n’est pas bien payé. Je suis prête. Mon objectif est de gagner ma vie et surtout d’être bien dans ce que je fais et d’être à ma place.

Je suis embauchée, refais une formation de type alternance et obtiens mon diplôme d’État dans l’année de mon arrivée dans l’entreprise.

Rapidement on me confie une agence, je m’entends bien avec mon boss, j’ai de bons résultats.

Comment trouvez-vous les ressources pour rebondir ?
J’aime le défi, je choisis d’y arriver haut la main (j’obtiens une mention). Je souhaite montrer à mes deux fils que je suis capable de me remettre en question, de refaire un troisième métier, de repasser un diplôme et de recommencer quelque chose que je ne sais pas faire et de réussir.

Le regard de mes enfants, de ma famille proche m’aide également. Avoir réussi une première formation et trouvé un poste dans l’hôtellerie me permettent d’avoir confiance dans cette deuxième transition.

J’adore mon métier parce qu’il y a énormément de reconnaissance en face, cela me fait plaisir d’être remerciée parce que j’accompagne, je prodigue des conseils, j’ai le ton juste à des moments très particuliers ; je ne peux pas me tromper.

C’est gratifiant pour moi de me dire que je suis utile à des personnes de tous horizons à un moment dur de leur vie.

Une troisième transition pourrait être la direction d’une résidence pour les séniors !

En quoi voyez-vous des liens entre les métiers de l’accompagnement professionnel et les besoins générés par les transitions socio-économiques actuelles ?

Sans bilan de compétences, je n’aurais pas abouti à faire une formation. À l’époque ma vision est court-termiste. Le bilan m’a aidée professionnellement et personnellement à me projeter.

Je me sens accompagnée et valorisée pour aller mieux.

Je retrouve confiance. Je lis dans le regard des autres de l’admiration pour mes succès.

Dans mon métier précédent, je suis orientée objectifs, résultats, réussites, tant pis si c’est dur, il faut que je gagne de l’argent. Je développe l’entreprise et son chiffre mais je n’aide personne en particulier.

Dans l’hôtellerie, j’aide les personnes à trouver des solutions, je prodigue des conseils. Je rends service ce que je ne fais pas auparavant. Gérer des réceptionnistes, des femmes de chambre, ça c’est important.

Dans le funéraire tout prend son sens, oui, il y a bien sûr un volet développement économique de l’agence. Je ne fais pas du chiffre pour faire du chiffre. Notre rôle de conseiller funéraire apparaît comme nébuleux auprès des familles, les personnes pensent que nous allons profiter de la situation de deuil.

Contrairement aux idées reçues, je mets les gens à l’aise, tout ce qu’ils décident est bien car cela vient d’eux, j’écoute, j’explique, j’adapte…

Aujourd’hui, je mets mes compétences au service de mon employeur, de mon équipe, et surtout au service de familles qui sont en deuil. Le contexte est très particulier et pour le coup il faut être solide. Même si je suis touchée, je suis là pour écouter, accompagner, personnaliser un moment unique dans leur vie.

Je donne une autre image du « passage » obligé. J’en fais un lieu de relation, une rencontre. Tout malentendu doit être dissipé, je prends le temps pour chacun.

C’est gratifiant pour moi de me dire que je suis utile à des gens quels qu’ils soient à un moment particulièrement compliqué de leur vie.

Si quelqu’un prévoit son contrat obsèques, je lui rends la démarche facile, peut-être rigolote ! Je dédramatise, un lien se crée.

Les personnes repassent à l’agence spontanément ou sur mes conseils, elles donnent de leurs nouvelles. C’est plutôt chouette car c’est à la fois faire partie du microcosme local et prendre conscience que mon travail et ma personnalité ont de l’importance.

Elles reviennent me voir car « je symbolise » une dédramatisation de l’évènement (sauf lorsqu’il s’agit d’enfants).

Je suis au service de l’environnement sociétal pour le rendre plus serein et confortable pour les familles.

L’environnement sociétal se situe également au niveau de nos relations institutionnelles, c’est une relation humaine particulière car nous avons à offrir des fins de vie respectueuses.

Je ne suis pas dans un raisonnement économique mais de respect et d’humain.

Ce qui me plaît, c’est de rendre un moment unique, réussi, respectueux et chaleureux.

Propos recueilli par Marie-Luce Barthelémy

[1] Isabelle LASLIER-OKALA : après un parcours de plus de 20 ans dans des sociétés de services informatiques et financiers, puis dans le secteur pharmaceutique (laboratoire BAYER, répartiteur pharmaceutique OCP répartition…) dans les Directions Communication, Relations Publiques et Marketing Opérationnel, Isabelle LASLIER-OKALA a opté pour une première reconversion professionnelle, grâce à la réalisation d’un bilan de compétences avec le groupe GRANDIR. La consultante qui l’accompagne dans cette réflexion lui fait prendre conscience de ses compétences, Solidités® personnelles et professionnelles, et la guide vers une formation certifiante dans le secteur de l’Hôtellerie Restauration.

Elle est diplômée de l’«Executive MBA » en un an « Hôtellerie et branding de Luxe », qui lui permet ensuite d’être embauchée en tant qu’Adjointe de Direction dans un Boutique Hôtel 4*.

Puis le même groupe hôtelier lui confie la Direction d’une autre Boutique Hôtel parisien… la période COVID a pour conséquence la fermeture des établissements hôteliers, le tourisme ne redémarre pas… Période propice pour une nouvelle introspection : comment rebondir et effectuer un métier en adéquation avec ses valeurs, ses aspirations et ses compétences ?

Le secteur des Services Funéraires prend alors tout son sens : accueil et prise en charge de familles en deuil, organisation d’obsèques, coordination de prestataires et d’équipes dans un délai court, gestion des relations avec les institutionnels locaux (mairies, hôpitaux, maisons de retraites…), tenue d’une agence et d’une équipe de collaborateurs, réussite de cette agence, tant sur le plan financier que relationnel, d’image… et d’humanité surtout.

Après un diplôme d’état de Conseiller Funéraire, Isabelle LASLIER-OKALA est rapidement promue Responsable d’une Agence PFG à Suresnes où les résultats ne se font pas attendre : image positive auprès des familles, de l’écosystème de l’agence, résultats financiers en hausse, management d’une équipe de Conseillers Funéraires, tutorat de nouveaux entrants.